A Breteuil-sur-Iton (appartenant à la nouvelle commune de Breteuil), la nature et le patrimoine bâti cohabitent en véritable harmonie. Cette ancienne ville fortifiée, développée par le cousin et proche conseiller de Guillaume Le Conquérant,  est une petite cité normande entourée par les eaux et les étangs. Elle possède un beau patrimoine médiéval, mais également des monuments remarquables du XIXème siècle. Un circuit historique de 2,5 km révèle une grande partie de ces merveilles d’hier et d’aujourd’hui. Suivez-moi !

Munie de la brochure du circuit historique (voir fin de l’article), je débute ma balade au départ de la Place Laffitte. Sur cette lumineuse et vaste place, commerces, services et restaurants se côtoient depuis toujours. En effet, elle était autrefois nommée la place de la halle car, en son milieu, s’élevait une vaste Halle aux marchands.

Le clapotis de l’eau attire mon attention. Une jolie fontaine siège au centre de la place et annonce la couleur : Breteuil est une ville ou l’eau et la nature ont leurs droits.

Ici se dresse l’Hôtel de Ville. A mes yeux, c’est sans doute le plus étrange monument du sud de la Normandie. Etrange, ou plutôt insolite, car cette Mairie a des allures de chapelle néo gothique. L’édifice, inscrit aux Monuments Historiques, fut construit dans les années 1860, à la place de la chapelle de l’Hôtel Dieu. Cette dernière accueillait malades, mendiants et pèlerins. C’est en mémoire de cette époque que le bâtiment actuel revêt cette architecture remarquable.

Place Laffitte

Je longe le noble bâtiment et me dirige vers la rue des Lavandières qui porte bien son nom puisqu’elle borde le canal de l’Iton où se trouve encore deux lavoirs. Pour satisfaire les besoins de la population ainsi que les nécessités de la défense, Guillaume le Conquérant fit creuser, vers 1030, ce canal plus élevé que le cours naturel, dérivant les eaux de l’Iton, en aval de Francheville, pour alimenter les fossés de Breteuil. Ce passage au bord de l’eau, joliment fleuri, est très agréable. Plus agréable encore lorsque je remarque la présence de la tour carré, un des vestiges des fortifications médiévales de la ville.

© Eye Eure Productions

Au bord de ce canal, en relevant la tête, je suis saisie par la vision de cette immense allée enherbée qui s’ouvre depuis la rue des lavandières jusqu’à l’école communale, 350 mètres plus loin. Ce sont Les Plesses, qui furent un lieu de promenade et de loisirs dès le XVIIIème siècle. Une authentique trouée verte au beau milieu du centre ville !

Les Plesses

Sur ma droite, au bord de l’Iton et des Plesses, se trouve le Musée Vie et Métiers d’Autrefois. Ici, plus de 35 métiers et scènes de vie des XIXème et XXème siècles sont exposés et contés par un collectionneur passionné. Une belle expérience que j’ai pu vivre lors d’une précédente visite (lire cet article).

Je poursuis ma promenade vers la place Pillon de Buhorel. Entre la Poste et la salle des fêtes, derrière le monument aux morts, un petit espace vert m’invite à entrer dans le jardin public. En dehors du rire gras d’une poignée de canards et le discret ruissellement du canal qu’il faut franchir pour y entrer, rien ne laisse deviner le magnifique parc qui se cache derrière. Une fois encore, je suis frappée d’un sentiment d’évasion face à cette vaste étendue verte qui s’ouvre devant moi !

Ce jardin traversé de belles allées arborées, abrite un étang de 3,5 hectares aux rives ombragées et parsemé de presqu’iles. Une faune et une flore abondante colonisent les berges classées Natura 2000 et, depuis peu, classé Espace Naturel Sensible. Un véritable Jardin d’Eden niché au cœur de la ville ! D’ici quelques mois un sentier pédagogiques permettra de prolonger cette balade nature sur 2,5 km. Je reviendrai sur ce sujet dans un autre article…

En sortant du parc, j’aperçois sur ma droite un imposant château de briques rouges orné de nombreuses sculptures. C’est l’ancienne demeure de la famille Buhorel. Nul doute que cette magnifique bâtisse ferait un formidable décors de cinéma pour un scénario se déroulant au XVIIIème siècle.

Et puisqu’on parle du 7ème art : à cet endroit précis du circuit, juste dans mon dos, se trouve le Lux. La façade de cette salle communale ressemble à celle d’une salle obscure dédiée à Bourville, le célèbre acteur normand. Il faut savoir que le film « le Trou Normand » (1952) a été réalisé en partie à Breteuil. Des photographies du tournage sont d’ailleurs exposées sur le mur du restaurant Au Feu de Bois (place Laffitte) et sur la grille de l’IPTP (rue d’Urclé). Preuve que la ville séduit les cinéastes.

Je rejoins à nouveau la place Laffitte et emprunte la rue Girard au bout de laquelle je découvre des vestiges du patrimoine industriel du XIXème siècle. J’admire notamment au n°79, cet étonnante façade de briques joliment travaillée. Il s’agit d’un ancien dépôt des activités de M. Pillard Soulain. Sa résidence personnelle se situe quelques mètres plus loin, dans la rue du docteur Brière. Datée de 1868, la façade de cette immense propriété me donne des indices sur la profession qu’exerçait cet homme : masse du tailleur de pierres, compas, équerre, fil à plomb sont sculptés sur le pignon… 

Détail de l’ancienne maison de M PIllard Soulain

Je longe maintenant la rue Gambetta et découvre au n°58, la Maison d’Orléans. Je suis impressionnée de savoir que c’est une ancienne demeure royale ! Construite entre 1842 et 1845, elle fut la propriété du roi Louis Philippe et le siège de l’administration de la forêt de Breteuil dont il était propriétaire.

Dans la rue du Moulin, j’ai de nouveau rendez-vous avec l’eau et la verdure. Outre le cimetière – qui abrite les tombeaux des grands bienfaiteurs et donateurs de la ville – ou cet ancien moulin transformé en immeuble d’habitation, cette paisible ruelle résidentielle présente un magnifique point de vue sur la ville et son église.

La Bonde

Ce lieu, que l’on nomme La Bonde, est le déversoir du petit étang. Ici, l’eau serpente entre les maisons et les îlots de terre où paissent quelques moutons et se chamaillent quelques canards. Les vestiges des anciens vannages sont à porté de mains. Je n’en ai jamais approché de si près !

Anciens vannages

La rue débouche sur l’église St-Sulpice. Sa couleur brune est due à l’utilisation du grison, matériau que l’on retrouve en abondance dans le sol de la région. Cette pierre contient des petits morceaux de silex liés entre eux par une pâte ferrugineuse qui, en s’oxydant, lui donne sa couleur rousse. Mon imagination me laisse entrevoir la silhouette d’archers bretoliens au sommet de l’imposant clocher. En effet, à sa construction, Guillaume de Conquérant prévit de joindre l’utile à l’agréable : une église pour y célébrer l’union de sa fille Adèle avec Etienne de Blois (1086), surmontée d’une tour de guet pour surveiller les alentours de la forteresse.

Cette église classée aux Monuments Historiques, est ouverte tous les jours. Ma curiosité me pousse à franchir le seuil. Je suis à nouveau saisie par les volumes du bâtiment. Je me sens soudainement toute petite et je marche à pas feutrés pour ne pas perturber la quiétude des lieux. En sortant, le grand orgue ( XVème siècle), l’un des plus anciens de Normandie, me fait face. J’admire sur le buffet d’orgue  les figures d’Indiens du Brésil rappelant les contacts établis par les navigateurs normands avec le Nouveau Monde.

Je continue la promenade dans la rue Aristide Briand où se succèdent de belles maisons normandes à pans de bois, de briques et de tuileaux. Je m’amuse à en observer le détail des inscriptions, et emblèmes de familles bourgeoises. La diversité de matières, de styles et de couleurs concentrés dans cette petite rue me laisse sans voix !

A l’angle de la rue Paul d’Urclé et de celle du 11 novembre, entouré par ses grilles, se trouve l’ancien château de Bonald. J’ai eu la chance de découvrir cet établissement au cours d’une porte ouverte lors des Journées du Patrimoine. La découverte de son histoire m’a laissé un souvenir très émouvant. On raconte qu’Henri IV y aurait passé la nuit avant la bataille d’Ivry, mais l’origine de cette maison bourgeoise remonterait bien au delà de 1691. D’abord maison familiale, puis colonie de vacances, le château est réquisitionné pendant la seconde guerre mondiale pour en faire la « Komandantur ». Une des chambres a servi de prison et les caves, de lieu de questionnement des résistants. Dès 1972, l’association Richard Baret investit les lieux pour en faire un Institut Thérapeutique, Educatif et Pédagogique. Aujourd’hui encore, cette magnifique propriété accueille des enfants, adolescents ou jeunes adultes qui présentent des difficultés psychologiques perturbant leur socialisation et leur accès à la scolarité et à l’apprentissage.

Cette balade fut une succession de surprises et de découvertes. Entre vieilles pierres et espaces verdoyants, Breteuil mérite plus que jamais son titre de Station Verte de Vacances !

Bien d’autres pépites sont à découvrir dans cette jolie cité normande : le site castral où nichent de nombreux hérons, les bustes de grands hommes tels que Théodule Ribot ou Jacques Laffitte, la médiathèque Le Kiosque dont la terrasse offre une magnifique vue sur l’étang, l’aire de jeu du jardin public où les plus jeunes s’adonnent au joie de la tyrolienne, la rue de la gare où subsistent des vestiges de l’ancienne voie ferrée….

Un document de 8 pages détaillant ce circuit est disponible gratuitement à la Maison d’Information du Public de Breteuil (02 32 29 82 45), à la Mairie de Breteuil (place Laffitte), à l’Office de Tourisme Normandie Sud Eure (02 32 32 17 17). Un livret-jeu pour les enfants de 7 à 12 ans est également disponible gratuitement pour suivre ce circuit en s’amusant. Télécharger les documents ici.